"Indépendance alimentaire", "ceinture verte", "zones de maraîchage". Des concepts mais aussi des réalités. Des termes mis en avant car ça fait "bien", c'est dans l'air du temps et ça fait plaisir aux écolos.
Hier se terminait la possibilité au public de mettre un commentaire sur le dossier d'enquête d'
un projet de destruction de 180 hectares de terres agricoles. Bien sur, la chose n'était pas présentée ainsi, mais "L’ambition de cette opération économique s’inscrit dans une dimension régionale voire nationale avec comme objectif la production d’un cadre qualitatif pour ses entreprises et ses usagers tant sur le plan urbanistique, paysager, environnemental que sur le plan des services proposés (services publics ou privés).
Il a vocation à accueillir des activités économiques regroupant industrie et bureaux dans un souci de rayonnement régional selon une approche qualitative et environnementale exemplaire. A cet effet, le parc sera labellisé EMAS et certifié ISO 14 001." Le projet est donc bourré de recommandations environnementales. Une "approche environnementale certifiée", on peut donc être rassuré, tout va donc bien...
... Mais non, tout ne va pas bien! La chose est si sérieuse que depuis plusieurs jours les mails circulent dans le petit milieu écolo dijonnais, des mails d'alertes pour aller se rendre en mairie afin de rédiger quelques lignes sur le fameux dossier d'enquête. Une action louable mais dont les impacts sont connus d'avance: absence de prise en compte des remarques!
Mais quel est donc le problème? Ne serait-ce pas pour le bien de tous de construire "un cadre qualitatif" pour des entreprises? Les arguments classiques vont bien sur être "création d'emplois", "croissance" (ah, cette fameuse croissance...), "exportation", "compétitivité", etc... Il faut être "pragmatique" diront d'autres...
Bien sûr qu'il faut un boulot pour tous, mais à quel prix? Le prix de prendre le risque de ne plus pouvoir manger demain? Aujourd'hui les hypermarchés sont pleins de légumes et autres fruits, mais jusqu'à quand? Quand? A part les écolos qui font ce qu'ils peuvent pour alerter et les élus qui jouent les autruches devant le problème, qui connaît ce qui se cache derrière l'accaparement des terres?
Qui a la moindre idée du grand monopoly des terres arables?
Quel rapport avec Dijon, tout ça est si loin? Un esprit un tant soit peu curieux se demandera d'où viennent les aliments que l'on mange, comme l'absurdité de ces
tomates en hiver ou de ces
pommes... Qu'ils soient produit si loin, quelle importance diront certains? L'esprit curieux continuera à réfléchir et découvrira que ce qui permet d'acheminer notre nourriture dijonnaise est le pétrole. Sans pétrole, pas de transport! Et alors? Et alors, cessons de faire l'autruche, nous avons dépassé le fameux
pic pétrolier, comme le démontre très bien
un article du Monde. Le pétrole bon marché, c'est définitivement terminé!
La conséquence à court terme de l'accaparement des terres et de la hausse du prix du pétrole, avec l'augmentation de la population mondiale qu'il faut bien nourrir est une augmentation des prix des aliments. C'est mathématique.
Imaginons le doublement du prix de tous les légumes et fruits, les dijonnais resteront-ils sans bouger comme aujourd'hui? La parade à ce destin inéluctable est la production alimentaire locale, ce qui est faisable comme l'a montré
une étude rennaise. Encore, faut-il avoir des terres pour faire pousser les végétaux. Et c'est justement là que la boucle est bouclée: l'agglomération dijonnaise va détruire 180 hectares de bonne terre agricole, sans parler des tous petits projets comme à
Ahuy ou
Marsannay.
Il existe bien
un rapport sur l'agriculture périurbaine dijonnaise. Mais un rapport reste un rapport...
Ayant en tête les effets de la mondialisation, la réalité du bétonnage des terres françaises (l'équivalent un département disparaît sous le bitume tous les 7 ans!), peu importe les arguments environnementaux pour vendre le projet, ces derniers n'en demeurent pas moins qu'un catalogue de greenwashing.
Une fois que les terres sont détruites et bétonnées, les légumes ne pousseront plus!...
"Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière empoisonnée, le dernier poisson capturé, alors vous découvrirez que l'argent ne se mange pas."... (proverbe amérindien)